Immune System


Sprouting, a bioprocess supporting food industry?

La germination, un bioprocédé au service de l’industrie agroalimentaire ?


Résumé - Les preuves scientifiques récentes lient la prévalence de certaines maladies (maladies

cardiovasculaires, obésité, diabète de type 2, certains cancers) au régime alimentaire inadapté. La

consommation d’aliments fonctionnels est l’une des alternatives recommandées dans la prévention de

ces maladies. Le blé est une céréale omniprésente dans le régime alimentaire méditerranéen vue son

intérêt énergétique et nutritionnel : protéines, glucide, fibres, vitamines… De nos jours, les pays

occidentaux s'intéressent de plus en plus à la germination des graines en raison de la demande des

consommateurs d'aliments peu transformés, sans additifs, plus naturels, nutritifs et sains. La germination

est un phénomène physiologique qui s’accompagne d’un transfert complexe de flux de nutriments. Cette

revue s'intéresse à décrire le processus de germination du blé, et à étudier son effet sur la qualité et les

propriétés nutritionnelles des céréales, et en particulier du blé. Au cours de la germination a lieu une

dégradation des macromolécules de réserves (amidon, protéines) suite à la mobilisation du capital

enzymatique. De façon concomitante, d’autres molécules bioactives sont synthétisées, telles que les

polyphénols et les vitamines. Ainsi, la germination contribue à l’amélioration de la qualité nutritionnelle.

Elle modifie également les propriétés sensorielles et fonctionnelles du blé. Ces modifications font du

blé germé, un ingrédient fonctionnel naturellement enrichi en molécules bioactives, intéressant à

incorporer dans des formules alimentaires.

Mots clés :  Blé, germination, ingrédient fonctionnel, molécules bioactives, technologie céréalière

Résumé - Les preuves scientifiques récentes lient la prévalence de certaines maladies (maladies

cardiovasculaires, obésité, diabète de type 2, certains cancers) au régime alimentaire inadapté. La

consommation d’aliments fonctionnels est l’une des alternatives recommandées dans la prévention de

ces maladies. Le blé est une céréale omniprésente dans le régime alimentaire méditerranéen vue son

intérêt énergétique et nutritionnel : protéines, glucide, fibres, vitamines… De nos jours, les pays

occidentaux s'intéressent de plus en plus à la germination des graines en raison de la demande des

consommateurs d'aliments peu transformés, sans additifs, plus naturels, nutritifs et sains. La germination

est un phénomène physiologique qui s’accompagne d’un transfert complexe de flux de nutriments. Cette

revue s'intéresse à décrire le processus de germination du blé, et à étudier son effet sur la qualité et les

propriétés nutritionnelles des céréales, et en particulier du blé. Au cours de la germination a lieu une

dégradation des macromolécules de réserves (amidon, protéines) suite à la mobilisation du capital

enzymatique. De façon concomitante, d’autres molécules bioactives sont synthétisées, telles que les

polyphénols et les vitamines. Ainsi, la germination contribue à l’amélioration de la qualité nutritionnelle.

Elle modifie également les propriétés sensorielles et fonctionnelles du blé. Ces modifications font du

blé germé, un ingrédient fonctionnel naturellement enrichi en molécules bioactives, intéressant à

incorporer dans des formules alimentaires.

Mots clés : Blé, germination, ingrédient fonctionnel, molécules bioactives, technologie céréalière

Sprouting, a bioprocess supporting food industry?

1. Introduction

L‘émergence des pathologies liées à l‘alimentation (maladies cardiovasculaires, obésité, diabète) a

rendu les consommateurs, de plus en plus conscients de la relation existante entre l‘aliment et la santé.

L'incorporation de molécules bioactives dans des systèmes alimentaires présente donc beaucoup

d‘intérêt pour le développement d‘aliments fonctionnels novateurs, un volet en plein essor dans les

industries agro-alimentaires. Ces aliments peuvent être dotés d'avantages nutritionnels ou réduire le

risque de certaines maladies (JORT 2008). (Ecrite différemment sur la liste bibliographique)

Le régime méditerranéen est marqué par la consommation de fruits et légumes, de céréales, de

légumineuses, d'huile d‘olive et de poissons. Il est notamment riche en molécules anti-oxydantes et en

fibres. L‘évolution du rythme de vie a cependant induit une modification des habitudes alimentaires

avec le développement de nouvelles tendances qui divergent de celles du régime méditerranéen.

2. Un passage de la dormance à la vie active

Le blé est une monocotylédone qui appartient au genre Triticum de la famille des Gramineae. C‘est une

céréale dont le grain est un fruit sec et indéhiscent, appelé caryopse, constitué d‘une graine et de

téguments. Les deux espèces les plus cultivées sont le blé tendre (Triticum aestivum) et le blé dur

(Triticum durum) mais il existe d‘autres espèces qui se différencient par leur degré de ploïdie (Feuillet

2000). Son développement comme pour la plupart des plantes est un processus cyclique.

Pour déterminer le commencement d‘un cycle, chez les plantes, il est pratique de partir de la germination

de la graine. Les graines sont des organes quiescents capables de survivre longtemps dans des conditions

défavorables. Lorsque les conditions deviennent favorables, la reprise de la croissance se déclenche avec

la germination. La germination est influencée par des facteurs intrinsèques comme les variétés de graines

et extrinsèques comme la température, l'humidité, et la lumière (Nelson et al. 2013 ; Świeca et Dziki

2015). Świeca et Dziki (2015) ont attribué un rôle clé au temps et à la température de germination, alors

que le rôle de l'élicitation était marginal.

La première étape est l'absorption de l‘eau et la réhydratation des tissus par un processus appelé

imbibition. L‘imbibition par l‘eau stimule la synthèse de gibbérelline qui à son tour, favorise

l’expression des gènes des enzymes hydrolytiques (Nelson et al. 2013). Cette mobilisation marque la

transition de la dormance à une forte activité métabolique. En effet, la libération d'enzymes

hydrolytiques permet de digérer et de mobiliser les réserves (amidon, protéines…) surtout que l’activité  des enzymes inhibitrices diminue comme l’ont montré les résultats de Mak et al.

3. Une pratique à intérêt nutritionnel

La germination permet l'amélioration de la qualité nutritionnelle du blé (Tableau 1 ; Chavan et al. 1989;

Hung et al. 2010; Donkor et al. 2012; Hübner et Arendt 2013). Les teneurs en nutriments et molécules

bioactives dépendent des conditions de germination (Yang et al. 2001), ainsi que des conditions

environnementales, des zones géographiques de culture, des facteurs génétiques et de l'évolution des

variétés ou des méthodes d'extraction et de quantification (Lee et al. 2016).

Au cours de la germination, plusieurs modifications ont lieu suite à une dégradation de certaines

macromolécules, transport de quelques éléments vers d‘autres emplacements et synthèse de nouveaux

métabolites (Lorenz et D'Appolonia 1980). Ainsi, la germination du blé conduit à une dégradation de

l‘amidon et à la libération d'oses simples, notamment du glucose (Panfil et al. 2014) sous l'action de l‘αamylase (Singh et al. 2001; Aoki et al. 2006; Fardet 2010). Des travaux réalisés dans notre laboratoire

ont mis en évidence un dédoublement des teneurs en sucres réducteurs après germination du blé (Jribi

et al. 2018). D'autre part, ce bioprocédé permet un accroissement de la teneur en fibres dans le blé germé

(Koehler et al. 2007; Hung et al. 2015) et particulièrement en arabinoxylane (Singkhornart et al. 2013). 

4. Effets sur la santé humaine

De par sa composition biochimique, le blé germé peut jouer un rôle dans la prévention de certaines

pathologies comme les maladies cardiovasculaires, le diabète de type 2 et certaines diarrhées. En effet,

plusieurs études ont mis en exergue que la consommation de germes de blé peut réduire le risque de

maladie coronarienne en réduisant les lipides sériques. A titred’exemple, une étude cas-témoin sur des

adultes sains a montré qu'un régime supplémenté germes de blé induit une baisse significative des taux

plasmatiques de triglycérides en postprandial (Cara et al. 1992). De même, la consommation régulière

de germes de blé pendant 4 semaines a conduit à une diminution des teneurs sériques en cholestérol total

et triglycérides aussi bien chez des adultes sains (Sarshar et al. 2015) que chez des patients

hyperlipidémiques (Reza Zakeri et al. 2009 ; Sarshar et al. 2015). Chez des rats, Lairon et al. (1987) ont

montré que l'ajout de germe de blé à un régime à teneur élevée en cholestérol et en matières grasses a

significativement augmenté le taux sérique de cholestérol des lipoprotéines de haute densité (HDL) et a

abaissé les triglycérides de lipoprotéines de très faible densité (VLDL). Ces résultats pourraient être en

partie expliqués par le fait que l'ajout de germes de blé au régime alimentaire permet chez le rat, de

diminuer l'absorption intestinale du cholestérol alimentaire, en interférant avec l'hydrolyse des lipides

dans l'estomac et l'intestin grêle (Borel et al. 1990). En outre, Sarshar et al. 

5. Une pratique à maîtriser : risques sanitaires

En dépit de leur fort intérêt nutritionnel, les graines germées présentent un risque microbiologique

considérable. En effet, les graines peuvent contenir des micro-organismes pathogènes. De par ses

conditions opératoires d’humidité et de température, la germination favorise leur croissance et leur

multiplication (Peles et al. 2012), or ces graines sont généralement consommées crues. D’ailleurs, ces

dernières années, des outbreaks se sont produites principalement aux États-Unis, au Canada, en Australie

et en Europe. Aux Etats-Unis, la Food Safety américaine a dénombré 35 toxi-infections collectives entre

1998 et 2015 reliées à la consommation de graines germées crues ou très peu cuites (blé, luzerne, haricots

etc), ces toxi-infections sont désormais dénommées « Sproutbreaks » (CDC). D'après la base de données

« outbreak database » aux Etats Unis, en 2014 cinq patients ont été infectés par Listeria monocytogenes

après avoir consommé des germes de haricot mungo. En 2016, 36 patients ont été contaminés par

Salmonella et 11 par Escherichia coli O157 après avoir consommé des germes de luzerne. En Australie,

en 2015, 230 cas dont 43 hospitalisés ont été contaminés par Salmonella suite à la consommation de

germes de haricot (Journal Daily Mail 2015). En 2011, l’Allemagne a rapporté la propagation d’infection

due à la Shiga toxine produite par Escherichia coli (Sérotype O104:H4) suite à la consommation de

graines germées (Frank et al. 2011) : 3200 personnes étaient atteintes dont 50 sont décédées. En France,

la même année, des cas similaires ont été observés (Gault 2012).

6. De nouvelles propriétés fonctionnelles et sensorielles

La germination agit non seulement sur les propriétés nutritionnelles du grain de blé mais aussi sur ses

propriétés sensorielles. Des études rapportées par Hübner et Arendt (2013) ont montré que la

germination modifie l'apparence, la flaveur et le goût du grain. Comme il a été précédemment

mentionné, les enzymes naturelles, telles que les amylases et les protéases, qui sont présentes dans le

grain sont exprimées pendant la germination. Il est donc possible de produire des farines naturellement

enrichies en enzymes (Marti et al. 2017). La germination améliore donc leur palatabilité, due à ces

enzymes activées, qui décomposent partiellement l'amidon.La germination modifie également les propriétés fonctionnelles et mécaniques. En effet, Dziki et

Laskowski (2009) ont observé une diminution de la dureté chez les grains de blé germés, réduisant ainsi

les besoins en énergie lors du broyage. Les travaux d’Ariyama et Khan (1990) ont montré que la

germination a contribué à une élévation du taux d’extraction lors de la mouture avec l’obtention de

farine à teneur en protéines plus élevée.

7. Applications en industries agroalimentaires

Le blé germé dans des conditions contrôlées peut être stabilisé par séchage (Shingare et Thorat 2013).

En effet, une étude préliminaire réalisée dans notre laboratoire a consisté à sécher le blé germé au soleil.

Les résultats ont montré que le séchage au soleil a engendré des pertes au niveau des molécules

bioactives. En dépit de ces pertes, le blé germé séché a présenté de meilleures propriétés nutritionnelles

comparativement au blé non germé (Jribi et al. 2018).

Sur un plan technologique, il est nécessaire de considérer la germination comme un bioprocédé

permettant non seulement de dégrader les molécules de réserve (protéines, amidon) mais aussi la

formation d'enzymes germinatives. Par exemple, l'enzyme alpha-amylase joue un rôle primordial en

technologie céréalière. L'incorporation de cette enzyme contenue dans le blé germé lors la fabrication

de spaghettis n'a pas modifié les paramètres sensoriels texturaux et la conservation du produit fini

(Dexter et al. 1990). La teneur relativement faible en humidité de la pâte et la perte rapide d'humidité

dans les spaghettis pendant les premiers stades de séchage limitent l'action de l'alpha-amylase présente

dans les germes de blé, pendant le traitement des spaghettis, indépendamment de la procédure de

séchage.


8. Conclusion

La germination est un bioprocédé permettant l’amélioration du profil nutritionnel du blé. Elle permet le

développement d’un ingrédient fonctionnel tout en respectant le concept de « Naturalité ». Elle peut

donc contribuer à répondre à la demande croissante des consommateurs pour les produits alimentaires

naturels qui sont également sains et savoureux. Le recours à ce bioprocédé nécessite néanmoins une

manipulation dans des conditions contrôlées afin de limiter les risques microbiologiques. Il est

également primordial de tenir compte de la préservation des propriétés techno-fonctionnelles du blé.

Des études sont actuellement menées sur l'optimisation technologique de ce bioprocédé et sur

l'application des grains germés et leurs farines dans des aliments transformés tels que des produits

extrudés, des pâtes et des biscuits. L'incorporation de ces farines dans des produits céréaliers tels que le

pain ou les biscuits, sous la forme d'aliments fonctionnels, peut fournir une forte concentration de fibres,

de vitamines, et d'antioxydants qui peuvent jouer un rôle dans la prévention contre les maladies, comme

certains cancers, et les maladies cardiovasculaires.


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